L’exposition Beyond the Horizon présente le travail de la photographe et artiste néerlandaise Scarlett Hooft Graafland, dont la pratique se situe au croisement de la photographie, de la performance et de la sculpture. Ses images moyen format, réalisées en argentique, résultent d’interventions éphémères dans des paysages fragiles et souvent reculés — des salars boliviens aux déserts du Yémen, des territoires arctiques aux étendues du Noord du Canada (Nunavut), en passant par Madagascar et les îles du Pacifique.
Bien plus que de simples documents, ses photographies sont des mises en scène minutieusement orchestrées. Objets du quotidien, tissus colorés, formes sculpturales ou silhouettes humaines viennent y perturber l’ordre naturel du paysage. Ces apparitions provoquent des dissonances subtiles, mêlant humour, surréalisme et poésie visuelle, tout en éveillant une conscience accrue du lieu. Chaque image devient une fable visuelle — ludique, critique, et profondément attentive à la relation que nous entretenons avec la nature et les identités culturelles.
Un trait distinctif de son œuvre réside dans son refus absolu de la retouche numérique. Chaque photographie constitue l’unique trace d’une performance réalisée in situ, capturée en une seule prise. Cette exigence d’authenticité souligne à la fois l’impermanence du geste, la fragilité des environnements traversés, et la vérité du moment vécu.
Au cœur de sa pratique s’inscrit une véritable philosophie de la lenteur : voyages au long cours, immersion patiente dans les paysages, observation attentive de la lumière et des rythmes naturels, collaboration étroite avec les communautés locales. Dans un monde saturé d’images instantanées, son travail invite à la pause, à la contemplation, et à la redécouverte de l’émerveillement.
Pour le Photo Brussels Festival, une sélection d’œuvres met en lumière cette approche singulière, combinant rigueur conceptuelle et poésie visuelle. Le travail de Hooft Graafland résonne avec des enjeux contemporains tels que l’écologie, le dialogue culturel et la nécessité d’une présence attentive — autant d’aspects qui font de sa voix une contribution particulièrement pertinente pour le thème du Festival.
Carrière artistique de Scarlett Hooft Graafland
Origines et formation
Scarlett Hooft Graafland est née en 1973 à Maarn (Pays-Bas). Elle vit et travaille à Amsterdam.
Elle est diplômée de la Royal Academy of Fine Arts (La Haye, 1995–1999), a suivi un programme post-graduate à la Bezalel Academy of Arts and Design (Jérusalem, 1999–2000), puis a obtenu un MFA en sculpture à la Parsons School of Design (New York).
Formée à l’origine comme sculptrice, elle a commencé par photographier ses installations et performances, avant de faire de la photographie un médium autonome au cœur de sa pratique.
Approche artistique et méthodes
Scarlett Hooft Graafland voyage dans des lieux souvent éloignés, isolés, parfois hostiles ou spectaculaires : déserts de sel, régions polaires, zones littorales ou îles lointaines.
Elle collabore fréquemment avec les habitants locaux : après des semaines — parfois des mois — de préparation, elle monte avec eux des performances, sculptures ou installations dans le paysage naturel.
Le résultat photographique n’est pas un simple document, mais l’aboutissement de la création : une image finale, pensée, chorégraphiée, souvent surréaliste, magique, qui mêle nature, culture locale, poésie, parfois humour ou ironie.
Elle utilise encore l’argentique : ses photos sont prises avec un appareil photo sur pellicule, sans retouche numérique. Pour elle, c’est le moyen de préserver l’authenticité et la spontanéité du moment.
Thèmes & esthétique
Ses images évoquent la fragilité de la nature, la disparition des cultures traditionnelles et les tensions entre modernité et modes de vie ancestraux. Elle aborde ces sujets avec poésie, légèreté et une dimension souvent surréaliste.
En introduisant dans le paysage des éléments inattendus — ballons, pigments, objets colorés, vêtements, structures sculpturales — elle transforme l’environnement en un théâtre visuel où réalité et imaginaire se rencontrent.
Ses photographies invitent à réfléchir à la relation de l’homme avec la nature, l’identité et les différences culturelles, tout en conservant une dimension de mystère et d’enchantement.
Parcours & reconnaissance
L’artiste a exposé dans de nombreux musées et galeries à travers le monde, notamment en solo : Huis Marseille (Amsterdam), Photomuseum Hanmi (Séoul), Landskrona Museum (Suède), Fotografiska (Stockholm), ainsi que dans diverses institutions en Europe, en Amérique du Sud et en Asie.
En 2025, elle fait l’objet d’une importante exposition rétrospective au Museum Panorama Mesdag (La Haye), intitulée Mesmerizing, réunissant plusieurs de ses œuvres majeures — anciennes et récentes — dont une nouvelle création réalisée spécialement pour l’occasion.
Son travail figure dans de nombreuses collections publiques et privées, muséales et institutionnelles.
Évolution récente
Dans ses séries les plus récentes, elle explore de nouvelles formes, notamment en combinant photographie argentique et broderie à la main, ajoutant une dimension artisanale et tactile à ses images.
Elle poursuit ses voyages, explore des territoires inattendus, collabore avec des communautés locales et continue d’inscrire ses œuvres dans un dialogue entre nature, culture et mémoire.